Alors que dans le ciel on aperçoit encore
Des étoiles briller entre l’aube et l’aurore,
Accompagnés parfois par la lune qui luit,
Nous nous mettons en marche aux ombres de la nuit.
Pleins de foi et d’élan nous gravissons les pentes
De la douce colline en parcourant les sentes
Au milieu des buissons de bruyère et de thym
A travers les rochers, les chênes et les pins.
Sous un ciel sombre encor parmi les ombres grises,
Nous marchons stimulés par une fraîche brise
Dont le flux caressant ces vallons rocailleux
Nous apporte souvent des parfums délicieux.
Nous montons pas à pas le long des sentes blanches
A l’entour des pins dont nous caressons les branches,
Comme nous saluons d’une cordiale main
Tous les êtres vivants rencontrés en chemin.
Enfin en arrivant en haut de la colline
Et son sommet rocheux qui largement domine
Les vallées alentour et leurs quelques maisons,
Nous admirons un temps la ligne d’horizon
Maintenant soulignée par un long nimbe orange
Colorant les nuées en vastes ailes d’anges.
Alors pour méditer, là nous nous installons,
Tournés vers le levant au-dessus des vallons.
De safran la couleur peu à peu devient rose,
Embrasant pour un temps en une apothéose,
– Splendeur de l’aurore dévoilée à nos yeux -,
Toute l’immensité de la voûte des cieux !
Puis, après un moment, cette teinte s’efface
Rendant au bleu azur et profond tout l’espace,
Pendant que le halo jusque là indécis,
Derrière l’horizon en un point plus précis,
Concentré à présent, permet que l’on devine
L’endroit d’où jaillira la lumière divine.
Un instant avant que l’astre ait pris son essor,
Tremble sur l’horizon comme une perle d’or
Et soudain du cœur de cette clarté confuse,
Instantanés et purs, les premiers rayons fusent,
Eclatants et glorieux depuis le firmament !
Posé sur l’horizon, on croirait un diamant,
Une pierre précieuse de taille irréelle
Dont les feux chatoyants tout à coup étincellent !
Puis le disque s’étend en lumineux croissant,
Ouvrant l’éventail de faisceaux resplendissants
Et transfigurant tout par sa pure lumière
Comme un voile doré sur la nature entière.
Derrière l’horizon, après avoir surgi,
Majestueusement, l’astre d’or s’élargit,
Eclipse tous les monts dont il quitte la crête,
Elevant dans l’azur une sphère parfaite.
Bénis soient ces moments célestes et enchanteurs
Où nous nous recueillons dans la pure fraîcheur,
Baignés par cet afflux d’énergie matinale
Que déverse sur nous notre puissante étoile !
De même que ces fleurs qui se ferment le soir
Lorsque la nuit épand son ample crêpe noir,
Au matin nous ouvrons à cette sainte flamme
Nos corps et nos visages, nos cœurs et nos âmes.
On croirait presque boire un puissant élixir,
Quand des bénédictions viennent nous envahir,
Déversant les vertus que contient la lumière
Et que nous appelons dans toutes nos prières :
L’amour, la pureté, la force et la beauté
La sagesse, la paix et l’immortalité !
Tout en restant assis sur le sol de la terre,
Dans les plans éthérés et les subtiles sphères
Nos âmes et nos esprits, pour un temps libérés,
Montent vers les sommets de mondes ignorés,
Ces plans supérieurs où il n’y a pas de lutte,
Sur lesquels on savoure pour quelques minutes
La sensation de vivre dans l’éternité.
Ô instants d’harmonie et de félicité,
Don précieux empli de spirituels délices
Dont on ne peut jamais épuiser le calice !
Les trésors du soleil qui descendent du ciel
Sur nos âmes affamées sont versés comme un miel,
Une manne ou un baume ou peut-être un saint chrême,
Pain éthérique et nourriture suprême !
Puis enfin inspirés pour le reste du jour,
Pleins de gratitude et le cœur gonflé d’amour,
Rayonnants, animés d’une joie manifeste,
Nous laissons le soleil à sa course céleste
Et quittons ce haut lieu, un peu comme à regret,
Redescendant les pentes de ce mont sacré,
Pleinement enrichis par les cadeaux solaires,
Rechargés par le don divin de la lumière
Pour vivre un nouveau jour à nul autre pareil
Heureux et béni par le lever du soleil.
AJ avril 2022